Bonjour à tous
Les Gauthier
La famille Gauthier est l'une des plus grandes familles à avoir pris racine sur l'ancien
territoire de la Nouvelle-France où l'on attendait impatiemment la venue de défricheurs,
de bûcherons, de colons, d'administrateurs, de chirurgiens, d'apothicaires, de taillandiers,
de couteliers, d'administrateurs, de tisserands, de soldats et de prêtres. Ces Gauthier
exercaient ces métiers et d'autres encore.
Ces hommes et ces femmes dont le patronyme est un
ancien prénom auquel on donne parfois le sens de bûcheron et, d'autre fois, le sens de
gouverneur ou de chef sont partis de tous les coins de France. Ils se sont embarqués, à
La Rochelle ou à Rochefort après avoir quitté l'Angoumois, l'Ile de France, le Poitou,
l'Artois, la Normandie, la Saintonge, la Guyenne, la Bourgogne, l'Aunis, la Provence,
la Champagne, l'Anjou.
Ils étaient plus de trente, hommes et femmes, les tout premiers transportant dans leurs
maigres bagages de nombreux surnoms qui ont parfois supplanté le nom Gauthier. S'ils étaient
soldats, ils avaient hérité des noms de Francoeur, Frappe d'Abord, Labonté, Jolicoeur, Larose
où Larouche. Des terres et des villages d'origine leur avaient donné les noms de Varennes,
LaVérendry, Boisverdun où La Chenaye, Landreville, Delisle et Poitevin. Le hasard leur attribua
des surnoms encore inexpliqués, dont celui de Saguingoira est le plus bel exemple.
Parce qu'ils étaient partis de tous les coins de France ils se sont établis en Amérique, en
choissisant tous les pôles connus. Les uns se sont faits explorateurs, transportant leurs
pénates sur le territoire qui allait devenir les Etats-Unis. Ceux qui sont demeurés en
Nouvelle-France ont choisi Québec, Trois-Rivières, la vallée du Richelieu ou celle du
Saint-Laurent et, enfin Montréal. Parce qu'ils étaient partout à la fois, se mariant, donnant
naissance à des enfants qui ont pris racine un peu partout, épousant même des Gauthier, il
est difficile, pour leurs descendants, de se rattacher à un ancêtre plutôt qu'à un autre.
Les généalogistes ont cependant pu établir que Mathurin Gauthier dit Landreville, Jean Gauthier
dit Larouche, Charles Gauthier dit Jolicoeur, Germain Gauthier dit Saint-Germain et Pierre
Gauthier dit Saguingoira ont encore des descendants que l'on peut compter par milliers, si
l'on s'en donne la peine...
De tous ces ancêtres, Pierre Gauthier dit Saguingoira est certainement celui qui a eu l'existence
la plus tumultueuse. Né vers l629, dans le bourg d'Eschillais, non loin de Brouage, en Saintonge,
il est le fils de Jacques et de Marie Boucher. Une recherche menée par Alphonse Gauthier démontre
qu'on ne peut fixer avec certitude la date de l'arrivée de l'ancêtre en Nouvelle-France. En l668,
il est au nombre des résidents de La Chine, une terre concédée par le Séminaire de Saint-Sulpice
à Cavelier de LaSalle.
Le 3 novembre l668, riche d'une terre sur laquelle il a peut-etre déjà construit une maison,
Pierre Gauthier «habitant demeurant en la Seigneurie de La Salle», 39 ans, s'engage à épouser
Charlotte Roussel ou Rousselle, âgée de 22 ans. Le contrat est signé à Montréal, dans la maison
de Jean Gervaise, devant le premier notaire de l'endroit, Bénigne Basset. Le couple, dont le
mariage est célébré neuf jours plus tard, va vivre à La Chine où Jean naîtra au mois de septembre
de l'année suivante. La terre n'appartient pas encore officiellement au colon, mais en l67l, le
3l mai, l'acte de concession est signé entre Pierre Gauthier dit Saguingoira et les Sulpiciens
auxquels Cavelier de La Salle a revendu sa seigneurie. Par cet acte, Gauthier s'engage à
construire une habitation dans le village.
Au mois de novembre de la même année, cette cabane
«de pieux en terre, ses appartenances et dépendances» sont vendues par Gauthier et Jean Gervaise,
les deux entrepreneurs, aux marchands Charles LeMoyne et Jacques LeBer. Achats, ventes ou
transactions, tout se conclut modestement. S'il emprunte, comme il le fait le 3 janvier l678, de
Jean-Baptiste Migeon, sieur de Bransat, Gauthier promet de rembourser en argent, en blé ou en
«bonnes pelleteries». En l684, sept enfants partagent la vie de Charlotte Roussel et de Pierre
Gauthier qui est institué gardien des biens d'Antoine Roy dit Desjardins et de Julien Talus dit
Vandamont, ce dernier ayant tué le premier dans une affaire d'adultère.
Pour les Gauthier comme pour tous les habitants de la région de Montréal, l689 est une année de
deuil, d'angoisses et de bouleversements. A La Chine, les 4 et 5 août, c'est le massacre et,
parmi les victimes et les disparus, on note les noms de Pierre Gauthier et de Charlotte Roussel.
La famille qui comptait huit enfants s'appuira désormais sur les secours d'Anne, née en l676 et
qui épouse, le 22 février l689, Jacques Denis dit Saint-Denis.
Pour ceux qui restent à La Chine, la vie continue, malgré les parents absents. Charlotte Roussel
a vraisemblablement été tuée aux premiers jours de son enlèvement mais Pierre Gauthier, plus
chanceux, n'est pas mort; en l698, Jacques Denis accepte en son nom une concession de terre de
soixante arpents. On dit de Gauthier qu'il est «captif chez les Iroquois nos ennemis».
C'est vers cette époque qu'il est remis en liberté. Le l6 août l699, il assiste au mariage de son
fils Joseph et de Clémence Jarry. Le veuf est également témoin au mariage de sa fille Marie et
d'Alexandre Turpin, le 25 février l702. L'année suivante, il partage entre ses huit enfants la
partie des biens appartenant à leur défunte mère. C'est par un tirage au sort que sont attribuées
à chacun les parcelles de la terre de La Chine dont la plupart sont rachetées le même jour,
l0 mars, par Jean Messiot. Au mois de septembre, Pierre Gauthier dicte son testament. Il meurt
le 8 décembre l703, à l'âge de 74 ans."
Source : Nos Racines No. 38
Dictionnaire Drouin rouge,
Association des familles Gauthier
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